06/04/2021

Entre continuité et renouveau 2011 – 2015 : la présidence de Claude Lessard

Cela fait 40 ans que Claude Lessard travaille dans le milieu de l’éducation. Il a été professeur de sociologie de l’éducation à la Faculté des sciences de l’éducation de l’Université de Montréal, dont il a également été le doyen de 1991 à 1995. Il a cofondé le Centre de recherche interuniversitaire sur la formation et la profession enseignante (CRIFPE), a été membre de plusieurs conseils et commissions et titulaire de la Chaire de recherche du Canada portant sur le personnel et les métiers de l’éducation de 2001 à 2011.

M. Lessard, quels ont été les bons coups du Conseil sous votre présidence?

Je mentionnerais d’abord le rapport sur l’état et les besoins de l’éducation Remettre le cap sur l’équité, dont je suis très fier. Il a remis sur la place publique les questions d’équité et d’inégalités, notamment au secondaire, et forcé une prise de conscience sur les effets inégalitaires de certaines politiques et pratiques (l’école à trois vitesses) sur le parcours des étudiantes et des étudiants au collégial et à l’université. Ce rapport est également à l’origine d’un premier partenariat entre le Conseil et l’Institut de la statistique du Québec pour la validation d’analyses de données quantitatives.

L’avis intitulé Retracer les frontières des formations collégiales : entre l’héritage et les possibles est un autre bon coup, qui a eu le mérite de pousser la réflexion sur l’avenir de la formation technique au collégial et sur son arrimage avec l’université, notamment dans le secteur de la santé. C’est un bel exemple, je pense, d’un avis pour lequel on a pris le risque de sortir des sentiers battus en proposant notamment d’allonger la formation technique au collégial.

Enfin, le rayonnement à l’international du Conseil par sa participation à l’European Network of Educational Councils. Nous avons été le seul conseil non européen à y participer, et notre présence nous a permis d’en apprendre notamment sur les problèmes en éducation que vit l’Europe et sur les façons de faire là-bas. Nous y avons aussi constaté que les avis du Conseil circulaient abondamment au sein de la francophonie européenne.

Quels ont été vos coups de cœur, et pourquoi?                      

J’ai beaucoup apprécié les processus de consultation du Conseil, soit lors des visites régionales ou dans le cadre des rapports ou de la préparation des avis. Les consultations ont toujours enrichi les débats en les ancrant dans le vécu des acteurs. Elles étaient relativement faciles à réaliser, les gens sur le terrain acceptant volontiers de nous donner accès à leurs pratiques et à nous faire part de leurs opinions. C’était pour le Conseil l’occasion de tester des hypothèses, de valider des solutions, d’entendre des récriminations, de constater le chemin accompli ou à parcourir…

La dynamique même de la table du Conseil, la diversité des gens présents, leur engagement, leur respect du point de vue d’autrui et leur désir de contribuer à faire avancer l’éducation au Québec font partie des belles expériences de ma vie. D’ailleurs, je n’ai jamais croisé une personne malheureuse de faire partie du Conseil.

J’ajouterais également le caractère systémique du Conseil, qui en fait une institution unique en son genre. En ce sens, il est véritablement l’enfant du rapport Parent, car c’est l’ensemble du système qui est son champ de préoccupation, son intégration, sa cohérence. Sur le plan du fonctionnement de la table du Conseil, les membres présents doivent tous déborder de leur champ d’action professionnel habituel et accepter le regard des collègues venant d’un autre ordre d’enseignement. Chacun sort ainsi de sa zone de confort pour se retrouver à l’intersection de son univers professionnel et de celui des autres membres.

Selon vous, quel est le plus grand défi auquel sera confronté le milieu de l’éducation dans la période après-COVID?

Certes, la question des inégalités est centrale, mais on y répondra adéquatement que si l’on s’attaque à améliorer la condition enseignante. Il nous faut des enseignantes et des enseignants heureux au travail. C’est la variable la plus importante. Pour ce faire, il faut non seulement les rémunérer convenablement, mais surtout reconnaître leur autonomie professionnelle, les valoriser et capitaliser leurs savoirs et leurs expériences.

Les solutions ne sont pas évidentes et exigent un sérieux coup de barre, mais il faut y réfléchir de toute urgence; il nous faut trouver la façon de reconnaître ce métier, que l’on semble tenir pour acquis.

Pour entamer cette réflexion, peut-être faudrait-il d’abord demander aux enseignantes et enseignants actuels ce qui les motive à exercer ce métier et déterminer ce qui les démotive.


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